1840-1927

Les Canadiens français

1841 – Acte d’Union

1845 – Fondation d’une école pour filles et d’un hôpital à Ottawa par les Sœurs Grises de la Croix

1847 – Création du Diocèse de Bytown, Mgr Joseph-Bruno Guiges en est le premier évêque

1848 – Fondation du Collège de Bytown

1849 – Établissement d’une société de colonisation par Mgr. Guigues

1852 – Fondation de l’Institut canadien-français et de la Société Saint-Jean-Baptiste d’Ottawa

1855 – La ville de Bytown devient la ville d’Ottawa

1857 – Fondation du Collège de l’Assomption

1858 – Fondation du premier journal de langue française à Ottawa : Le Progrès

1867 – Confédération Canadienne (Acte de l’Amérique du Nord britannique)

1871 – Loi scolaire de l’Ontario

1874 – Adoption de l’unilinguisme anglais à l’Université d’Ottawa

1876 – Création du ministère de l’Éducation en Ontario

1883 – Ouverture de la mission Sainte-Anne-des-Pins de Sudbury par les Jésuites

1883 – Honoré Robillard devient le premier Franco-Ontarien à siéger à l’Assemblée législative de l’Ontario

1885 – Règlement imposant l’enseignement de l’anglais dans toutes les écoles

1890 – Obligation d’enseigner en anglais dans les écoles de l’Ontario

1896 – Wilfrid Laurier devient le premier premier ministre canadien-français

1910 – Tenue du Grand congrès des Canadiens français de l’Ontario et fondation de l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFÉO)

1912 – Ouverture de l’Hôpital Sainte-Marie à Timmins par les Sœurs de la Providence de Montréal

1912 – Adoption du Règlement 17 et début de la crise scolaire ontarienne

1913 – Fondation du journal Le Droit

1913 – Ouverture du Collège du Sacré-Cœur de Sudbury

1916 – Début de l’occupation de l’École Guigues et la Bataille des épingles à chapeau

1917 – Création de la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises (FNFCF)

1917 – Émeute de Ford City, un des événements marquants de la crise du Règlement 17

1918 – Ouverture d’une salle de classe au sous-sol de l’Église Saint-Antoine à Timmins par le père Charles-Eugène Thériault

1923 – Ouverture de l’école libre de Pembroke par Jeanne Lajoie

1926 – Création de l’Ordre de Jacques-Cartier

1927 – Rapport Scott-Merchant-Côté favorable au rétablissement de l’enseignement en français

1927 – Mise en veilleuse du Règlement 17

À partir des années 1830, des vagues de migrations du Bas-Canada vers le Midwest américain et la Nouvelle-Angleterre inquiètent les leaders francophones. Afin de pallier à cet exode, Mgr. Joseph-Bruno Guigues, le premier évêque de Bytown, met sur pied une société de colonisation destinée à peupler particulièrement les comtés de Prescott et de Russell. L’essor de l’industrie forestière dans plusieurs régions, notamment Bytown (qui devient Ottawa en 1855) et Mattawa, ainsi que le développement de terres agricoles et l’exploitation minière contribuent également à la croissance de la population francophone. Par ailleurs, les chemins de fer, à partir des années 1880, ouvrent la région du Nord à la colonisation. Les progrès des peuplements francophones dans les régions de l’Est (Prescott, Russell), du Sud-Ouest (Essex, Kent), en Huronie (Simcoe) et dans le Nord-Est (Nipissing, Algoma) témoignent du succès de la colonisation. L’on commence à voir apparaître nombreuses institutions et organisations de langue française. Bytown (Ottawa) joue d’ailleurs un rôle important dans le développement de la communauté canadienne française et devient un pôle religieux (plusieurs communautés religieuses s’y installent), éducatif (les premières écoles françaises y voient le jour en 1845) et culturel (l’Institut canadien-français y est fondé en 1952).

En 1867, la Confédération est instaurée et rassemble les colonies britanniques en Amérique du Nord sous un seul gouvernement. Cette consolidation réunit toutes les populations d’origine française éparpillées à travers le Canada et une solidarité pancanadienne francophone se développe grâce aux associations et institutions et à l’Église catholique. Bien que la Confédération lie ces différentes communautés francophones, la constitution demeure vague quant à la protection des minorités religieuses et linguistiques de chaque province. C’est d’ailleurs au 19e siècle que la langue devient un marqueur identitaire important alors qu’elle avait très peu de poids auparavant. Une définition du Canada français émerge pour rassembler toutes les personnes communiquant en français, prenant part à la culture française et étant pour la plupart des descendants des Français de la Nouvelle-France. Ce groupe se définit comme formant une nation, ayant une histoire, des traditions, une langue, une culture, une origine et des aspirations communes.

Les Canadiens français de l’Ontario réclament des institutions qui leur sont propres afin de préserver leur langue, culture et religion. La paroisse canadienne-française offre alors un encadrement religieux, social, économique, politique et culturel; et développe des écoles, journaux, sociétés d’aide et autres organisations vouées à la promotion et protection de la langue française et de la culture canadienne-française. La religion et la langue vont de pair à cette époque et la plupart des institutions francophones gravitent autour de l’Église.

À l’époque du Canada-Uni (1841-1867) et au début du régime fédéral (1867-1883), les écoles de langue française ont le même statut que les écoles de langue anglaise. Certains groupes réclament la suppression des écoles séparées (confessionnelles) et les rapports sur l’état des écoles bilingues et de langue française jugent celles-ci inefficaces.

Dès 1876, le ministère de l’Éducation cherche à unifier le système d’enseignement en imposant un modèle unique. Des lois sont adoptées successivement limitant l’usage du français dans les écoles publiques bilingues et de langue française, imposant l’enseignement de l’anglais et finalement exigeant l’anglais comme langue unique d’enseignement et de communication en 1890. Cependant, l’utilisation du français est permise lorsque les élèves ne comprennent pas l’anglais; cette échappatoire permet de contourner la consigne du Ministère pendant vingt ans.

À l’instar de ces législations menaçant l’enseignement en français et de la situation précaire des Canadiens français, se tient en 1910 à Ottawa le Grand congrès des Canadiens français de l’Ontario. C’est lors de ce rassemblement qu’est fondée l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (ACFÉO) afin de trouver des solutions aux enjeux scolaires.

En 1912, le gouvernement adopte le célèbre Règlement 17 qui fait de l’anglais la seule langue d’enseignement dans les écoles publiques ontariennes. Cette loi provoque un long conflit et entraîne des épisodes de résistance en Ontario, dont la fameuse Bataille des épingles à chapeaux de 1916. L’ACFÉO devient le chef de la résistance et lance une campagne de désobéissance civile, et tient des manifestations et des rassemblements. L’ACFÉO est épaulée par une société secrète, L’Ordre de Jacques-Cartier qui protège les fonctionnaires canadiens-français au gouvernement fédéral et influence discrètement le réseau associatif francophone de la province. Les écoles séparées se répandent et plusieurs efforts sont faits pour mettre fin au conflit tant des côtés francophones qu’anglophones (notamment la Unity League of Ontario). En 1923, l’Université d’Ottawa ouvre l’École pédagogique d’Ottawa pour former des enseignants des écoles bilingues. Finalement, la Commission Scott-Merchant-Côté (1925) enquête sur l’efficacité de l’enseignement de l’anglais dans les écoles fréquentées par les Canadiens français et, suite à ce rapport, le gouvernement met en veilleuse le Règlement 17 pour permettre à nouveau l’enseignement du français en 1927. La même année, le gouvernement établit l’École normale de l’Université d’Ottawa qui formera pendant des décennies des milliers d’enseignants de l’Ontario français. C’est la fin de la crise scolaire, bien que le Règlement 17 reste en vigueur jusqu’en 1944. Le Règlement 17 marque profondément les Canadiens français de l’Ontario et crée un sentiment d’unité au sein de cette communauté. Suite à cette crise une période d’effervescence et d’affirmation de la communauté canadienne-française débute.

1840-1927

The French Canadians

1841 – Act of Union

1845 – Establishment of a school for girls and a hospital in Ottawa by the Grey Nuns of the Cross

1847 – Founding of the Bytown Diocese, Monsignor Joseph-Bruno Guigues is its first bishop

1848 – Establishment of the College of Bytown

1849 – Establishment of a settlement company by Bishop Guigues

1852 – Establishment of the French Canadian Institute and the Société Saint-Jean-Baptiste (“Saint-Jean-Baptiste Society”) of Ottawa

1857 – Establishment of Collège de l’Assomption (“Assumption High School”)

1858 – Founding of the first French-language newspaper in Ontario: Le Progrès

1867 – Canadian Confederation (British North America Act)

1871 – Ontario’s Common Schools Act

1874 – Adoption of a policy of unilingual English at the University of Ottawa

1876 – Creation of the Ministry of Education in Ontario

1883 – Founding of the Sainte-Anne-des-Pins of Sudbury mission by the Jesuits

1883 – Honoré Robillard becomes the first Franco-Ontarian at the Legislative Assembly of Ontario

1885 – Regulation imposing the teaching of English in all schools

1890 – Requirement to teach English in Ontario schools

1896 – Appointment of Wilfrid Laurier, the first French Canadian prime minister

1910 – The Grand congrès des Canadiens-Français de l’Ontario (“Great Convention of French Canadians in Ontario”) and establishment of the Association canadienne-française de l’Ontario (“French Canadian Association of Ontario”) (ACFÉO)

1912 – Adoption of Regulation 17 and the beginning of the Ontario school crisis

1912 – Founding of the Sainte-Marie Hospital in Timmins by the Sisters of Providence of Montreal

1913 – Launch of Le Droit newspaper

1913 – Opening of Sacred Heart College, Sudbury

1916 – Beginning of the occupation of Guigues School and the Battle of the Hatpins

1917 – Creation of the Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises (“National Federation of French Canadian women”) (FNFCF)

1917 – Riot in Ford City, one of the outstanding events of the Regulation 17 crisis

1918 – Opening of a classroom in the basement of the Saint-Antoine Church in Timmins by Father Charles-Eugène Thériault

1923 – Opening of the Pembroke Free School by Jeanne Lajoie

1926 – Creation of the Ordre de Jacques-Cartier (“Jacques Cartier Order”)

1927 – Merchant-Scott-Côté report, favourable to the restoration of French instruction

1927 – Regulation 17 is suspended

In the 1830s, waves of migration from Lower Canada to the American Midwest and New England become worrisome for Francophone leaders. To counteract this exodus, Bishop Joseph-Bruno Guigues, the first bishop of Bytown, creates a colonization society to populate Prescott and Russell counties. The booming logging industry in several regions, notably Bytown (which became Ottawa in 1855) and Mattawa, as well as mining and agricultural land development, contribute to Francophone population growth. From the 1880s onwards, railways open up the north to colonization. Increasing Francophone populations in the east (Prescott, Russell), southwest (Essex, Kent), Huronia (Simcoe) and northeast (Nipissing, Algoma) speak to successful colonization. French-language institutions and organizations begin to appear. Bytown (Ottawa) also becomes key in developing the French Canadian community. The area becomes a centre of activity for religion (several religious communities settle there), education (the first French schools are established in 1845) and culture (the French Canadian Institute is founded in 1952).

With Confederation in 1867, the British colonies in North America are united under one government. This consolidation includes all populations of French origin scattered across Canada. A Canada-wide French solidarity emerges with the help of the Catholic Church and a number of associations and institutions. Although Confederation links these different Francophone communities, it remains vague about the protection of religious and linguistic minorities in each province. It was also in the 19th century when language became an important marker of identity, despite carrying very little weight before. A definition of French Canada emerges, bringing together all who communicate in French and take part in French culture, most of whom are descendants of the French of New France. This group is defined as forming a nation with common history, traditions, language, culture, origin and aspirations.

The French Canadians in Ontario demand institutions of their own to preserve their language, culture and religion. The French Canadian parish provides guidance on religious, social, economic, political and cultural matters. It also launches schools, newspapers, aid societies and other organizations dedicated to promoting and protecting French language and French Canadian culture. Religion and language are interwoven and most Francophone institutions gravitate around the Church.

At the time of the united Province of Canada (1841-1867) and during the early federal regime (1867-1883), French-language schools enjoy the same status as English language schools. Some groups demand the abolition of separate (denominational) schools and report the state of French and bilingual schools as ineffective.

In 1876, the Ministry of Education attempts to unify the educational system by imposing a single model. Laws are successively adopted, limiting the use of French in bilingual and French language public schools and requiring the teaching of English. In 1890, the law enforces English as the sole language of instruction and communication. French is however permitted to students who do not understand English; this loophole therefore allows schools to circumvent for 20 years the Ministry’s ordinance.

As these laws threaten French education and as the precarious situation of French Canadians goes on, the Grand congrès des Canadiens-Français de l’Ontario (“Great Convention of French Canadians of Ontario”) is held in Ottawa in 1910. At this gathering the Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (“French Canadian Education Association of Ontario”) (ACFÉO) is established in order to find solutions to school issues.

In 1912, the government adopts infamous Regulation 17, instituting English as the sole language of instruction in Ontario public schools. This act leads to a long conflict and results in instances of resistance in Ontario, including the renowned Battle of the Hatpins. The ACFÉO acts as leader of the resistance and launches a civil disobedience campaign by organizing demonstrations and rallies. It is supported by a secret society, the Ordre de Jacques-Cartier (“Order of Jacques Cartier”), to protect French Canadian federal officials and quietly influence the province’s Francophone community. The number of separate schools increases and many efforts are made to end the conflict, by both Francophone and Anglophone sides (the latter notably including the Unity League of Ontario). In 1923, the University of Ottawa opens the École pédagogique d’Ottawa (“Ottawa Pedagogical School”) to train teachers in bilingual schools. Finally, the Scott-Merchant-Côté Commission (1925) carries out a survey on the effectiveness of teaching English in schools attended by French Canadians; in response to the report, the government amends Regulation 17 to once again allow teaching in French in 1927. This marks the end of the school crisis, although Regulation 17 remains on the books until 1944. Regulation 17, having deeply affected the French Canadians of Ontario, creates a sense of unity within the community. The end of the crisis ushers in a dynamic era of self-expression.