1927-1968

Les Canadiens français de l’Ontario

1929 – Fondation de l’Union des cultivateurs franco-ontariens

1934 – Naissance des sœurs Dionne à Corbeil

1936 – Création de la Société Radio-Canada

1938 – Fondation du Diocèse de Timmins

1939 – Création de l’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO)

1944 – Disparition du Règlement 17 des statuts de l’Ontario

1944 – Association des conseils d’éducation bilingues de l’Ontario

1947 – Ouverture du Théâtre du P’tit Bonheur (Théâtre français de Toronto)

1949 – Création de l’Association de la jeunesse franco-ontarienne (AJFO)

1950 – Dépôt du rapport de la Commission Hope qui demande l’abolition des écoles confessionnelles

1952 – Entrée en ondes de CFCL-Timmins, le premier poste de radio francophone

1953 – Fondation du Collège de Hearst par Monseigneur Louis Lévesque

1957 – Le Collège du Sacré-Cœur devient l’Université de Sudbury

1958 – Création du Centre de recherche en civilisation canadienne-française (CRCCF) à l’Université d’Ottawa

1960 – Fondation de l’Université Laurentienne à Sudbury

1963 – Ouverture de l’école normale de Sudbury

1963-1969 – Commission royale d’enquête sur le biculturalisme (Commission Laurendeau-Dunton)

1967 – Adoption des lois autorisant les écoles secondaires publiques de langue française en Ontario

1967 – Création du Comité franco-ontarien d’enquête culturelle

1968 – Adoption des lois autorisant les écoles secondaires publiques de langue français en Ontario (Loi 141)

1968 – Fondation de l’École secondaire catholique Thériault à Timmins comptant près de 2 000 élèves

La crise du Règlement 17 génère une effervescence de la communauté francophone et voit un accroissement de la mobilisation franco-ontarienne. Plusieurs institutions culturelles sont fondées dans les décennies suivant la crise scolaire et l’on assiste à l’affirmation de l’identité canadienne-française de l’Ontario. La dispersion des communautés francophones à travers le pays encourage aussi la mise en place de canaux de diffusion et le développement des institutions et de coopératisme.

Plusieurs ont dénommé la période suivant la crise scolaire « l’âge classique de la littérature franco-ontarienne » (1927-1960) avec plusieurs écrivains et poètes actifs et l’apparition de nombreuses maisons d’édition, d’imprimeries et de nombreux journaux à travers la province (Le Droit à Ottawa, le Carillon dans les comtés de Prescott et Russell, La Feuille d’érable à Tecumseh).

Pour les francophones du Nord-est de la province, la période est pionnière et voit l’établissement et le développement de communautés qui s’industrialisent autour des richesses naturelles tirées de la forêt (Hearst, Kapuskasing, Cochrane) et des mines (Timmins, Cobalt). Renonçant graduellement à l’exploitation agricole qui avait auguré la colonisation de la région, les francophones deviennent investisseurs, commerçants, exploitants, contracteurs ou ouvriers, qui sont résolument les acteurs clés du développement de la région. L’expansion importante des activités économiques et industrielles de la zone par des francophones, s’accompagne de la consolidation et de la diversification d’un réseau institutionnel qui compte, entre autres, des écoles, des associations communautaires et des médias d’information.

La première radio exclusivement francophone, CFCL, est mise sur pied à Timmins en 1952 grâce à Conrad Lavigne et l’ACFEO, suivie de la mise en ondes de CFBR à Sudbury en 1957 par Baxter Ricard. La Société Radio-Canada, fondée en 1936 afin d’encourager le développement d’une culture et d’une identité « canadienne », comporte deux réseaux (l’un francophone et l’autre anglophone – la Canadian Broadcasting Company) et les stations régionales de langue française se développent à partir des années 1960 : CJBC à Toronto, CBOF à Ottawa, CBEF à Windsor et CBON à Sudbury. La télévision de Radio-Canada est mise sur pied en 1952 dans les deux langues, puis CBOFT, la première chaîne de télévision de langue française hors Québec, voit le jour en 1955 à Ottawa.

C’est également une période foisonnante pour le théâtre et les arts de la scène à Ottawa et à Sudbury, ce dernier devenant ainsi le second foyer culturel de l’Ontario français. Le Collège du Sacré-Cœur de Sudbury est le principal centre d’activités culturelles de la région; c’est d’ailleurs où Père Germain Lemieux se consacre à la préservation du folklore canadien-français dès les années 1940 et fonde le Centre franco-ontarien de folklore en 1972. L’Université Laurentienne, bilingue et non confessionnelle, est fondée en 1960 et devient la seconde université bilingue en Ontario. Outre les institutions culturelles, plusieurs caisses populaires apparaissent dans les années 1940 et serviront de base économique à l’épanouissement des Canadiens français de l’Ontario.

Après la Grande Dépression des années 1930 et la Deuxième Guerre mondiale, les Canadiens français se tournent plus vers les centres urbains et des emplois dans le secteur des services. Jusqu’alors leurs activités économiques se concentraient plutôt dans les domaines agricoles, manufacturiers ainsi que dans les ressources naturelles. Par ailleurs, en offrant un encadrement, le clergé demeure un pilier des communautés francophones, et ce jusqu’aux années 1960 avec la baisse de la pratique religieuse et la fermeture d’organisations confessionnelles. C’est un point tournant pour la société canadienne française, alors qu’auparavant, la paroisse était au cœur la communauté francophone, des initiatives communautaires et culturelles naissent indépendamment de l’Église. Parallèlement, l’État intervient de manière plus soutenue dans les programmes sociaux et communautaires, ainsi que dans le domaine des arts et de la culture. En effet, à partir des années 1960, les fonds publics financent divers programmes, agences et organismes culturels, dont Radio-Canada, l’Office national du film, le Conseil des arts du Canada. En Ontario, le Conseil des arts de l’Ontario est instauré en 1963 et la chaîne éducative TVO voit le jour en 1970.

L’éducation continue de jouer un rôle central dans le développement identitaire des canadiens-français : bien que la crise scolaire soit terminée, les revendications en ce qui a trait à la scolarisation en français se poursuivent. L’Association des enseignants et enseignantes franco-ontariens (AEFO) voit le jour en 1939 et les concours annuels de français à l’élémentaire (1938) et au secondaire (1943) sont instaurés par Robert Gauthier, directeur de l’enseignement français en Ontario, afin d’augmenter le taux de fréquentation scolaire des Canadiens français jusqu’à la 8e année. L’éducation secondaire en français n’a lieu que dans les institutions privées; ce n’est qu’entre 1961 et 1965 que plusieurs mesures sont adoptées par le gouvernement provincial accordant le droit d’enseigner certaines matières en français dans les écoles secondaires publiques à la discrétion de la direction de l’école et des conseils scolaires locaux.

Bien que l’absence d’écoles secondaires publiques soit dénoncée par l’ACFEO ainsi que les organismes affiliés, parents, étudiants et membres du clergé catholique, ce n’est qu’en 1968 que trois méthodes d’instruction en français sont autorisées par le gouvernement : les écoles secondaires de langue française, des sections de langue française ou certains cours offerts en français dans les écoles de langue anglaise. Dès 1968, l’État met sur pied et finance plusieurs écoles secondaires de langue française. Les changements au système scolaire, les politiques de bilinguisme, et les revendications politiques et sociales affectent profondément les Canadiens français de l’Ontario.

1927-1968

The French Canadians of Ontario

1929 – Establishment of the Union des cultivateurs franco-ontariens (“Association of Franco-Ontarian farmers”)

1934 – Birth of the Dionne quintuplets in Corbeil

1936 – Creation of the Société Radio-Canada (SRC) and the Canadian Broadcasting Corporation (CBC)

1938 –Founding of the Timmins Diocese

1939 – Creation of the Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (“Franco-Ontarian Teachers Association”) (AEFO)

1942 – Creation of the Société historique du Nouvel-Ontario (“Historic society of New Ontario”) in Sudbury

1944 – Removal of Regulation 17 from the Ontario Statutes

1944 – Creation of the Association des conseils d’éducation bilingues de l’Ontario (“Bilingual Education Council Association of Ontario”)

1949 – Creation of the Association de la jeunesse franco-ontarienne (“Francophone Youth Association”) (AJFO)

1950 – Filing of the Hope Commission report advising the elimination of catholic schools

1952 – Launch of CFCL-Timmins, the first French radio program on the airwaves

1953 – Founding of Hearst College by Mgr Louis Lévesque

1957 – Collège du Sacré Cœur becomes University of Sudbury

1958 – Creation of the Centre for Research on French Canadian Culture (CRCCF) at the University of Ottawa

1960 – Establishment of Laurentian University in Sudbury

1963 – Opening of the École normale de Sudbury (“Sudbury Training College”)

1963-1969 – Royal Commission on Bilingualism and Biculturalism (Laurendeau-Dunton Commission)

1967 – Adoption of legislation authorizing public French-language secondary schools in Ontario

1967 – Creation of the Comité franco-ontarien d’enquête culturelle (“Committee for the Survey of the Cultural Life of Franco-Ontarians”)

1968 – Adoption of the laws authorizing French language public schools in Ontario (Bill 141)

1968 – Establishment of the École secondaire catholique Thériault in Timmins with more than 2,000 students

The Regulation 17 crisis ushers in a dynamic era within the Francophone community and sees an increase in Franco-Ontarian mobilization. Several cultural institutions are founded in the decades following the school crisis, thus contributing to an affirmation of identity amongst French Canadians in Ontario. The dispersion of Francophone communities across the country also encourages the establishment of distribution channels and the establishment of institutions and co-operative efforts.

The period following the school crisis often called the the “classical age of Franco-Ontarian literature” (1927-1960), with several active writers and poets and several publishing houses, printing companies and newspapers opening across the province (Le Droit in Ottawa, Le Carillon in Prescott and Russell counties, and La Feuille d’érable in Tecumseh).

For Francophones in the northeast, the period is a turning point; newly established communities undergo development and industrialization thanks to the natural resources found in the forest (Hearst, Kapuskasing, Cochrane) and mines (Timmins, Cobalt). By gradually abandoning farming, which had led to the region’s colonization, Francophones are now becoming investors, merchants, owners, contractors and laborers – all key in the development of the northeast. In addition to significantly expanding the area’s economic and industrial activities, Francophones embark in consolidating and diversifying an institutional network encompassing, amongst other organizations, schools, community associations and media.

Francophone television and radio also make their debut. The first exclusively French radio station, CFCL, opens in Timmins in 1952 by Conrad Lavigne and the ACFEO, followed by CFBR in Sudbury in 1957. The Société Radio-Canada, founded in 1936 to help develop of a “Canadien” culture and identity, consists of two networks: one Francophone, Société Radio-Canada, and one Anglophone, the Canadian Broadcasting Company (CBC). In the 1960s, French-language regional stations begin to appear: CJBC in Toronto, CBOF in Ottawa, CBEF in Windsor and CBON in Sudbury. Radio-Canada (CBC) television is launched in 1952 in both languages, followed by CBOFT, the first French-language television network outside Quebec, in Ottawa in 1955.

The period of 1927–1968 is also a prolific time for theatre and performing arts in Ottawa and Sudbury, the latter now Francophone Ontario’s second cultural capital. Sacred Heart College in Sudbury acts as the centre of cultural activity in the region. Here, in the 1940s, Father Germain Lemieux dedicates himself to preserving French Canadian folklore and founds the Franco-Ontarian Folklore Centre in 1972. The bilingual and non-denominational Laurentian University is established in 1960, thereby becoming the second bilingual university in the province. In addition to cultural institutions, many credit unions appear in the 1940s and serve as the basis for economic revitalization of French Canadians in Ontario.

After the Great Depression of the 1930s and the Second World War, French Canadians turn more to urban centres and jobs in the service sector. Until the 1940s, their economic activities are concentrated in the agricultural, manufacturing and natural resource sectors. Furthermore, in providing guidance to their parishioners, the clergy remains a pillar of Francophone communities until the 1960s, with the decline of religious practice and the closing of religious organizations. This is a turning point for French Canadians, for whom the Church had been at the heart of their community; social and cultural initiatives are now launching independently from the church. At the same time, the state is increasingly intervening in social and community programming as well as in arts and culture. In fact, in the 1960s, public funds begin financing various cultural programs, agencies and organizations, including the CBC, the National Film Board and the Canada Council for the Arts. On a provincial scale, the Ontario Arts Council is established in 1963 and the educational channel TVO is launched in 1970.

Education continues to play a key role in the evolution of French Canadian identity: although the school crisis is over, the claims with regards to schooling in French persist. The Association des enseignants et enseignantes franco-ontariens (“Association of Franco-Ontarian Teachers”) (AEFO) is founded in 1939. Robert Gauthier, the director of French education in Ontario, introduces annual French elementary (1938) and high school (1943) competitions in order to increase school attendance by French Canadians up to the eighth grade. High school education in French is relegated to private institutions; only between 1961 and 1965 does the provincial government adopt several measures granting the right to teach certain subjects in French in public high schools, at the discretion of the principals and the local school boards.

Although the ACFEO as well as affiliate organizations, parents, students and members of the Catholic clergy denounce the lack of public high schools, it is not until 1968 that the government authorizes three options for French instruction: French-language high schools, French-language sections and certain courses offered in French within English schools. In 1968, the State opens and finances the first of several French-language high schools. Such changes to the school system, as well as the policy on bilingualism and related political and social demands profoundly affect French Canadians in Ontario.